Lutte contre la corruption: l'Indice de Perception connait une baisse de 65,77% au Burkina Faso

 Le Rapport du Réseau national de lutte anti corruption (REN-LAC), pour le compte de l'année 2023, démontre que le phénomène de corruption a connu  une baisse comparativement aux données de 2021. Les expériences de la population, les régimes politiques ainsi que la situation sécuritaire que vit le pays sont autant de facteurs qui pourraient expliquer cette baisse.

En 2021, la perception des citoyens à travers les enquêtes menées par le Reseau nationale de lutte anti corruption (REN-LAC) a permis de comprendre que la corruption était fréquente au Burkina Faso. En effet, ce rapport indiquait que 85,23% de la population estimait que le phénomène de la corruption était récurrent, contre 65,77% en 2023 qui indique une baisse constante d'environ 20 points.

Les rapports du REN-LAC indiquent que les périodes post transition sont marquées par une hausse de la corruption notamment 2016-2021.

De ce graphique ci-dessous, on remarque que la corruption n'a fait qu'accroître au Burkina Faso. Entre le début du terrorisme en 2016, en passant par la COVID 19, le phénomène de la corruption a accru Burkina Faso. A croire que le temps de règne du gouvernement Kaboré a été marqué par un accroissement réel de la corruption jusqu’en 2023, où l’Indice de Perception connait une baisse.


Les expériences personnelles que vit un individu, l’environnement dans lequel il se trouve, ce qu’il voit, les informations qu’il reçoit, sont autant de facteurs qui peuvent nourrir la perception d’un citoyen. En effet, au vu de ce qu’il vit et voit, il peut déjà se faire une idée, sa propre perception sur l’état de la corruption.

Pour Issouf Paré, secrétaire chargé des études et des enquêtes du REN-LAC, le régime politique peut être un élément qui pourrait expliquer la baisse de corruption. Il influence l’opinion des citoyens et leur redonne généralement de l’espoir. Ils se disent qu’il y aura un changement avec l’avènement du nouveau régime politique.

« L’environnement politique, confie-t-il, contribue beaucoup. En 2022, on a eu un changement de régime. Généralement, quand dans une situation où le phénomène de la corruption est prégnant, les citoyens peuvent nourrir l’espoir de voir les choses changées ».

Par contre, le statisticien souligne que la corruption fonctionne par réseau. Lorsqu’un nouveau régime est mis en place, les réseaux de corruptions connaissent une dislocation pendant un certain temps en entendant la mise en place de nouveaux réseaux. Cela peut durer un bout de temps avant que les choses ne roulent à nouveau comme sur des roulettes. Il considère donc cela comme une raison de baisse de la corruption.

« Il y a un élément aussi important qu’il ne faut pas oublier. Le phénomène de la corruption est un phénomène qui se passe en réseau. Quand il y a un changement, il y a des réseaux qui se défendent et d’autres se construisent. Cela peut être un élément de baisse parce que le temps que le réseau qui était habitué à ses pratiques se défait, il faut reconstruire d’autres réseaux qui peuvent prendre un petit temps de latence pour bénéficier des fruits de la corruption », poursuit-il.

En 2015,  après l’insurrection de 2014, les citoyens espéraient un changement avec l’avènement du nouveau gouvernement. Bien que des réseaux ont été détruits, ils sont réapparus au bout de quelques années, parce les gens ont vite retourné dans leurs anciennes habitudes.

A en croire Issouf Paré, la perception de la corruption demeure un phénomène persistant malgré la baisse. Cependant, au regard de la situation d’antan, il préconise de la patience et de la prudence afin d’observer l’évolution de la situation dans quelques années, avant de se prononcer si réellement il y a eu baisse.

« On continue de voire des pratiques qui ne sont pas assez catholiques donc je ne dirai pas ça. Parce qu’en 2015, on a observé qu’il y a eu une inflexion de la perception après l’insurrection populaire mais après, les choses sont reparties. Donc il faut attendre de voir la tendance sur une, deux années pour effectivement confirmer qu’il y a eu une baisse de la corruption », affirme le statisticien.

Quand bien même la situation sécuritaire du pays peut également contribuer à une certaine évolution, elle n’explique pas totalement cette baisse de la corruption au Burkina Faso. L’insécurité règne dans le pays depuis 2016 et durant cette période jusqu’en 2021, la corruption n’a fait qu’accroitre.

C’est pourquoi, il souligne qu’il est du ressort des autorités à veiller de sorte que cette tendance tienne le cap.

« La situation sécuritaire, on l’a connait depuis 2016. Et la perception n’a fait qu’augmenter depuis cette période-là jusqu’à une date assez récente. Il faut que les autorités créent assez d’espaces de libertés et de garantir l’indépendance de la justice pour qu’elle puisse traquer le phénomène de la corruption comme il se doit. Sans ça ce serait très compliqué », a-t-il suggéré.

Tout porte à croire que la corruption à tendance à connaitre une baisse pendant les régimes de transition. 2015 en est un exemple. C’est d’ailleurs ce qui fait dire au politiste Dr Saidou Abdoul Karim, qu’il y a une correction entre régime politique et corruption car sous la transition de 2015, le rapport du REN-LAC avait également montré une baisse.

« Avec les changements de régime politique, et surtout lorsque les nouvelles autorités affirment vouloir combattre la corruption, les acteurs ont tendance à réduire les pratiques de corruption » a-t-il laissé entendre.

Selon les données de Transparency International, le Burkina Faso est passé de la 77ème place en 2022 à la 83ème place en 2023, avec une note de 41/100. Le pays n’a pas encore eu la moyenne qui est de 50/100. Cependant, Samuel Kaninda, Conseiller régional à Transparency International, dans une interview accordé à l’économiste du Faso en février 2024, confie que le pays est sur la bonne voie dans la lutte contre la corruption mais des efforts doivent encore être menés.

«Le pays est sur la bonne voie, mais des efforts constants et soutenus doivent se poursuivre. Il y a une loi de lutte contre la corruption. Il y a aussi des structures crédibles telles que l’Autorité supérieure de contrôle d’Etat  et de  Lutte contre la corruption (ASCE-LC) et le Réseau national de lutte anti-corruption (REN-LAC). Il faut que cette peur de gendarme soit maintenue pour que les fautifs sachent que toute violation de la loi sur la corruption est punitive. Je salue le fait qu’au Burkina Faso, des personnalités élues ou dirigeantes aient l’obligation de déclarer leur patrimoine dès leur prise de fonction. L’ASCE-LC, qui a le rôle de s’assurer de ce dispositif, maintient le cap », a-t-il indiqué.

Cette baisse de la corruption montre une évolution sur la lutte contre le phénomène de la corruption mais d'éventuels efforts devront etre menés pour encore elévé le niveau d'autant plus que le pays n'a pas encore eu la moyenne selon les différents rapports de Transparency International.

 

Muriel Dominique OUEDRAOGO

 

 

 

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